Dans un arrêt du 19 janvier 2017 (National Roads Authority), la CJUE rappelle qu’un organisme de droit public, s’il n’est pas en principe assujetti à la TVA pour les activités exercées en tant qu’autorité publique, doit toutefois être soumis à la TVA si son non-assujettissement « conduit à des distorsions de concurrence d’une certaine importance ».
L’appréciation de la notion de concurrence avec des opérateurs privés est parfois délicate. La CJUE confirme, dans cet arrêt, que la concurrence peut être actuelle ou seulement potentielle, mais ne peut en aucun cas être « purement théorique ».
La décision intervient dans le cadre d’un litige opposant l’administration fiscale irlandaise et la National Roads Authority (NRA) qui constitue un organisme de droit public irlandais chargé de la gestion du réseau routier public national.
L’administration fiscale irlandaise avait considéré que l’activité d’exploitation de routes à péage, exercée par la NRA, devait être assujettie à la TVA dès lors qu’il existait des opérateurs privés percevant également des péages dans d’autres zones géographiques.
Elle se fondait sur l’arrêt du 16 septembre 2008, Isle of Wight Council, considérant que les organismes de droit public doivent être soumis à la TVA dès lors qu’ils exercent une activité économique et ce, indépendamment du fait qu’il existe ou non une concurrence au niveau du marché local.
Dans son arrêt du 19 janvier 2017, la CJUE a quant à elle relevé que la construction d’une route et l’exploitation d’un péage par un opérateur privé, supposaient l’obtention préalable d’une autorisation de la NRA. L’exploitation, par un opérateur privé, d’un péage situé sur la même zone géographique que les péages exploités par la NRA, et entrant directement en concurrence avec les péages exploités par cette dernière, n’était à cet égard pas envisageable au cas particulier. Il n’existait donc aucune concurrence actuelle ou potentielle au titre de cette activité entre l’organisme public et une entreprise privée.
La Cour justifie sa position par le fait que l’objectif de l’assujettissement à la TVA des organismes de droit public est d’éviter que les organismes de droit privé ne soient désavantagés du fait du non assujettissement des organismes de droit public.
Par conséquent, en l’absence de toute concurrence possible ou potentielle entre les opérateurs privés et les organismes publics, ces derniers ne sauraient être assujettis à la TVA quand bien même ils exerceraient une activité économique.
Les organismes de droit public, qui ne sont pas à l’abri d’un risque fiscal en matière de TVA, doivent, de plus en plus, procéder à un audit de leurs obligations au regard des impôts commerciaux. Ils pourront trouver dans cet arrêt une grille d’analyse de leurs activités « potentiellement » ou « théoriquement » concurrentielles, afin de sécuriser leur situation en matière de TVA.