Le Gouvernement envisage d’insérer dans la loi de finances pour 2017 un dispositif anti-abus concernant le plafonnement de l’ISF.
Objectif du dispositif
L’objectif est de lutter contre la pratique de certains contribuables qui réduisent leur ISF en diminuant, voire en supprimant, de façon artificielle, les revenus retenus dans le calcul du plafonnement, grâce à l’interposition d’une société holding patrimoniale.
Pour mémoire, l’ISF est acquitté par les ménages dont le patrimoine excède 1,3 million d’euros. Lorsque l’impôt sur les revenus et l’ISF dépassent 75 % des revenus perçus l’année précédente, l’excédent constaté vient en diminution de l’ISF. Jusqu’en 2012, le dégrèvement obtenu était lui-même plafonné. Cette mesure ayant été supprimée par le Gouvernement qui souhaitait corrélativement élargir l’assiette de l’ISF en y intégrant les revenus latents (entre autres, les bénéfices non distribués par une société durant les 5 dernières années), un certain nombre de contribuables ont été tentés par un détournement du plafonnement de l’ISF en limitant leurs revenus.
L’hypothèse visée précisément par le législateur est celle de la capitalisation des revenus de capitaux mobiliers dans une holding patrimoniale (« cash box »), recueillant en lieu et place du contribuable, les dividendes distribués par une filiale afin qu’ils ne soient pas pris en compte dans le calcul du plafonnement. Le train de vie courant est alors assuré par l’utilisation de l’épargne disponible ou par un recours à l’emprunt.
Clause anti-abus proposée
Il est envisagé d’introduire une clause anti-abus visant les cas dans lesquels l’interposition d’une holding vise principalement à optimiser le plafonnement alors que les capacités contributives du contribuable sont accrues notamment par le recours à certains types d’endettement.
La sanction consisterait en la reconstitution des revenus du train de vie pour les intégrer dans les facultés contributives et par conséquent, dans le calcul du plafonnement.
Le nouveau texte anti-abus serait rédigé comme suit: « Les revenus distribués à une société passible de l’impôt sur les sociétés contrôlée par le redevable sont réintégrés dans le calcul prévu à l’alinéa précédent, si l’existence de cette société et le choix d’y recourir ont pour objet principal d’éluder tout ou partie de l’impôt de solidarité sur la fortune, en bénéficiant d’un avantage fiscal allant à l’encontre de l’objet ou de la finalité de ce même alinéa. Seule est réintégrée la part des revenus distribués correspondant à une diminution artificielle des revenus pris en compte pour le calcul prévu à l’alinéa précédent».
Il faut cependant se souvenir de la décision du Conseil Constitutionnel du 29 décembre 2012, dans laquelle la haute juridiction s’était opposée au projet du Gouvernement d’intégrer dans le plafonnement des revenus que le contribuable n’avait pas réalisés ou dont il n’a pas disposé.
Il est par ailleurs intéressant de noter que le Gouvernement vise ici les comportements ayant pour objet principal d’éluder l’impôt plutôt que ceux qui ont le même dessein à titre exclusif, critère retenu pour la mise en œuvre de la procédure d’abus de droit (article L 64 du LPF).
La formulation rappelle, par contre, les termes de la clause anti-abus prévue à l’article 119 ter du CGI dans le cadre du régime mère-fille, non applicable aux montages visant à obtenir, à titre d’objectif principal, un avantage fiscal allant à l’encontre de la finalité du régime et qui ne peuvent être considérés comme authentiques.
Pour l’application de cette disposition, un montage, et notamment l’interposition d’une société holding, est considéré comme non authentique s’il n’est pas mis en place pour des motifs commerciaux valables qui reflètent la réalité économique (LFR 2015).
Enfin, la rédaction du texte, en l’état, amène à s’interroger sur la possibilité pour l’administration fiscale d’imposer également au titre de l’impôt sur les revenus, les dividendes réputés distribués…
Plus que jamais, la vigilance est de mise lors de la constitution d’une holding patrimoniale, dont les avantages fiscaux, s’ils ne sont plus à démontrer, attirent, de plus en plus, l’attention de l’administration fiscale et du législateur.